Rapport de l’OCDE sur la politique économique de la Suisse


     


La forte appréciation du franc plaide pour la poursuite d'une politique monétaire généreuse : telle est la recommandation formulée dans le dernier rapport de l'OCDE sur la politique économique de la Suisse. Le rapport pointe toutefois des signes avant-coureurs d'une possible bulle immobilière et juge essentielle l’introduction de nouveaux instruments macroprudentiels. Il conviendrait d’une manière générale de réduire les incitations à l'endettement pour les ménages. Par ailleurs, la réglementation des grandes banques devrait aller au-delà de ce que prévoit le Parlement, afin de limiter les risques dans le système financier. Enfin, l'OCDE recommande une réforme fiscale et des stratégies de réduction des émissions de gaz à effet de serre davantage axées sur les coûts, afin d'améliorer les chances de croissance de l'économie suisse. Le rapport a été présenté à Berne le 24 janvier 2012 par Angel Gurría, secrétaire général de l’OCDE, en présence du conseiller fédéral Johann Schneider-Ammann.
L'OCDE atteste, dans son dernier rapport sur la situation économique de la Suisse, que le pays connaît une reprise globalement équilibrée après la crise. La croissance potentielle ne s'est pas étiolée suite à la crise et l'activité économique a été dynamisée par l'afflux de main-d'œuvre étrangère. Si la forte demande mondiale en biens et services suisses est parvenue à compenser partiellement la détérioration de la compétitivité-prix de la Suisse consécutive à la forte appréciation du franc en termes réels, les exportations ont toutefois reculé récemment. Les branches axées sur le marché intérieur bénéficient de taux d'intérêt à court et à long termes exceptionnellement bas. Selon l'OCDE, le bas niveau des taux a induit un boom hypothécaire et une hausse des prix de l'immobilier. Certains marchés immobiliers régionaux montrent des signes de surchauffe. Compte tenu de l'endettement brut élevé des ménages, les risques de formation d'une bulle des prix des logements pourraient être exacerbés pour les petites banques axées sur le marché intérieur.

Réforme fiscale favorable à la croissance

Dans le chapitre consacré à la politique fiscale, l'OCDE constate que la charge fiscale en Suisse est modérée en comparaison internationale. Néanmoins, ce constat doit être relativisé compte tenu du niveau élevé des cotisations obligatoires du système de santé et de prévoyance. L'OCDE recommande à la Suisse d'engager une réforme fiscale pour améliorer ses perspectives de croissance. L'imposition des personnes physiques doit être diminuée, tandis que celle frappant les biens et les services doit être relevée. De l'avis de l'OCDE, l'élargissement de l'assiette de la TVA et la hausse du taux normal de TVA consolideraient la croissance et limiteraient les distorsions. Des mesures visant à atténuer les pertes de revenu réel des ménages modestes pourraient accompagner une telle réforme. Une autre recommandation propose de ne plus limiter les possibilités qu'ont les autorités locales d'obtenir des recettes de la fiscalité de l'immobilier. L'augmentation de ces recettes compenserait en partie les pertes dues à la réduction de l'impôt sur le revenu au niveau local. En incitant les ménages à s'endetter, le système fiscal est susceptible d'aggraver tout nouvel épisode d'instabilité financière. L'OCDE recommande par conséquent de restreindre les dispositions avantageuses permettant de porter les intérêts débiteurs en déduction du revenu imposable. Dans une deuxième étape, il conviendrait d'abolir l'imposition de la valeur locative. Le système fiscal actuel incite non seulement les ménages à s'endetter, mais favorise une redistribution des revenus vers les ménages les plus riches.

Réduction des risques financiers grâce à une réglementation plus efficace des marchés financiers

Le deuxième chapitre traite des possibilités de réduction des risques dans le système financier pour les contribuables et pour les entreprises. Pour l'OCDE, la réglementation des grandes banques, encore fortement financées par des fonds de tiers, est un élément essentiel. En réponse à cette recommandation, le Parlement a approuvé une réglementation des grandes banques constituant une avancée considérable dans la gestion de ces risques. L'OCDE recommande au législateur d'exiger des deux grandes banques un ratio de levier supérieur aux quelque 5 % prévus. En ce qui concerne les exigences sur la structure du financement, les fonds propres de haute qualité (common equity) devraient représenter une part plus importante. Par ailleurs, un abaissement du seuil de fonds propres devrait être conditionné à des plans d'urgence crédibles et coordonnés sur le plan international visant à assurer la pérennité des fonctions d'importance systémique (telles que le trafic des paiements et certaines opérations de crédit domestiques) en cas de menace d'insolvabilité. Des enquêtes ont montré que le durcissement des exigences de fonds propres n'entraîne pas un coût social considérable sous la forme d'un resserrement du crédit. La stabilité financière pourrait ainsi être grandement améliorée à faible coût. L'OCDE recommande en outre d'introduire des instruments macroprudentiels pour limiter les déséquilibres tels qu'une expansion excessive du crédit.

Des stratégies de réduction des émissions de gaz à effet de serre davantage axées sur les coûts

Dans le chapitre consacré à la politique climatique, l'OCDE reconnaît que la Suisse se caractérise par un niveau d'émissions de gaz à effet de serre (GES) relativement bas, mais souligne qu'elle doit ajuster ses mesures climatiques si elle veut atteindre les objectifs fixés sur le plan international pour l'horizon 2020. Dans trois domaines en particulier, il importe de réaliser une meilleure efficience des mesures climatiques. Premièrement, l'introduction d'une taxe CO2 sur les carburants permettrait de lutter contre l'augmentation croissante des émissions de CO2 dans les transports routiers, secteur présentant le plus fort potentiel de réduction des émissions à un faible coût pour la Suisse. Idéalement, une redevance de congestion en fonction de l'heure et de la zone géographique pourrait être instaurée en parallèle. L'OCDE recommande, deuxièmement, d'améliorer le droit du bail (règles plus claires en matière de répercussion des coûts des investissements générateurs d'économies d'énergie) et d'augmenter la taxe CO2 sur les combustibles fossiles, pour inciter davantage les propriétaires à investir dans des rénovations génératrices d'économies d'énergie. Par ailleurs, des restrictions pourraient été envisagées concernant l'utilisation des recettes de la taxe CO2 sur les combustibles fossiles. La définition de l'assainissement énergétique et l'ampleur admise de la hausse de loyer devraient se fonder sur des critères clairement énoncés, comme le gain potentiel d'efficacité énergétique découlant de l'opération. Troisièmement, l'OCDE salue les efforts déployés par le gouvernement fédéral pour coupler le système suisse d'échange de quotas d'émission avec celui de l'UE afin que la politique climatique dans le secteur industriel soit davantage axée sur les coûts.

25/01/2012


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